Pourquoi j’ai voté contre la liste soumise au vote des sénatoriales lors du Conseil fédéral et voterai à nouveau contre lors du vote du 2 décembre.
Je veux d’abord saluer le travail de la commission électorale présidée par Rémi Féraud. Je sais combien ce genre d’exercice est particulièrement pénible et compliqué, pour y avoir participé lors de l’élaboration de la liste des régionales.
Sur cette liste il y a 2 sortes de candidats, les candidats socialistes parisiens d’une part et la candidate parachutée d’autre part.
Pour ce qui est de la liste des socialistes parisiens, je n’ai rien à redire. Il y avait une vraie logique à reconduire les 4 sénateurs sortants car tous en étaient à leur premier mandat. Par ailleurs, j’en profite pour dire toute ma gratitude à Roger Madec qui s’est conformé à ce qu’ont voté les adhérents parisiens sur les règles du non cumul, en dépit des petites manœuvres dans les coulisses pour ne pas faire reprendre l’amendement plébiscité par les militants parisiens au niveau national. Cette fédération montre une fois de plus l’exemple et ses élus savent respecter le vote des militants. Par ailleurs, comme je l’ai souligné lors du Conseil fédéral, cette liste reflète bien l’histoire commune des socialistes parisiens vécue depuis une vingtaine d’années, au delà même des sacro-saints équilibres de motion et de courant. Jean-Pierre Caffet est l’animateur du groupe, il est un des principaux animateurs de notre fédération depuis longtemps et il fut l’homme des programmes municipaux. Bariza Khiari fut celle qui fit entrer la diversité dans cette vieille et noble assemblée. David Assouline, un des sénateurs les plus actifs, en particulier sur le dossier brûlant des retraites. Si nous avons conquis siège après siège aux élections sénatoriales de 1995, puis 2004, puis 2010, ce n’est pas le fruit du hasard, mais bien le rapport à une histoire, celle de la conquête de Paris autour d’une fédération, de maires d’arrondissement et de Bertrand Delanoë qui nous a conduit de victoire en victoire et de conquête en conquête.
A partir du moment où il devenait difficile de remettre en cause les 4 sénateurs sortants, il allait de soi que le siège à conquérir, grâce à la nette progression des socialistes aux dernières élections municipales, devenait revenir à une femme et compte-tenu des équilibres de motions lors du dernier congrès, il était tout aussi évident que ce siège devait revenir à la Motion C.
C’est à partir de là que les choses ont mal tourné. La Motion C disposait de candidatures féminines de très grande qualité. Pauline Véron et Sandrine Charnoz pouvaient ainsi non seulement représenter la Motion C, mais également l’importance des arrondissements qui ont fait basculer Paris (le 9e et le 12e) et d’une certaine façon représenter également le fort renouvellement que la fédération de Paris a su insuffler lors du cru Municipales 2008. Je cite ces 2 camarades, mais il va de soi que je pourrais également citer Marie-Josée Raymond Rossi, camarade du 13e, injustement évincé des listes régionales en mars dernier pour des raisons d’équilibres internes à la Motion C.
La Motion C a préféré faire le choix du vieux parti, des vieilles méthodes et des vieilles pratiques (la rénovation est en marche camarades…) en avalisant le parachutage de Marie-Noëlle Lienemann. Cette dernière cherchant à nouveau un point de chute électoral après une tournée bien mouvementée. Pour mémoire, MNL a perdu dans sa circonscription de l’Essonne en 1997, en pleine vague rose. Elle est ensuite aller chercher le confort des douillettes et sûres circonscription du Pas de Calais, à l’instar d’une autre grande figure du socialisme en errance, Jack Lang. Elle jette son dévolu sur l’ex circonscription de Jacques Mellick à Béthune. Là où le PS faisait entre 64% et 70% des voix à chaque élection, elle se plante en 2002 à 48%. Mais l’appareil socialiste ne lui en veut pas trop et elle retrouve un siège de députée européenne de 1999 à 2009. Tout le monde l’attend à Hénin-Beaumont pour affronter Marine Le Pen et elle figure sur la liste sans la mener. MNL a de réelles qualités politiques. Elle a de vraies compétences notamment sur les questions de l’Eau et du logement. Mais elle en a une autre qui devient franchement pénible c’est sa médaille d’or de leçons de morales déplacées. J’ai le souvenir de l’avoir vu donner des leçons de morales sur la question des « affaires » à nombre de ses ex-camarades élus de l’Essonne. Pour ensuite choisir l’ombre du chevalier blanc Jacques Mellick… Enfin ses bouquins sortis au lendemain des défaites de Lionel Jospin ou de Ségolène Royal sont franchement d’une inélégance rare de la part de qui n’a pas fait de miracles sur le plan électoral.
Je ne suis pas hostile au parachutage par rigidité. Je connais des villes ou des fédérations qui ont été en demande et qui ont apprécié la venue de tel ou tel leader socialiste. Mais se faire parachuter pour conquérir une ville ou une circonscription est une chose surtout si c’est pour pallier l’absence de quelconque leadership local. Dans ce cas il y a prise de risque électoral et la greffe peut prendre ou ne pas prendre. Je constate d’ailleurs que là où de telles pratiques étaient acceptées facilement dans les années 70 ou 80, elles sont de plus en plus difficiles à convaincre lors des derniers scrutins. Lors des législatives de 2007, plusieurs candidats parachutés par la direction du PS ont vu leur parachute se mettre en torche face à des candidatures locales bien implantées. Le cas de Malek Boutih est le plus exemplaire de ces crashs électoraux, mais il y en a eu plusieurs. Et d’ailleurs la Motion C qui s’est fait une spécialité de l’incubation artificielle de candidats a vu nombre de ses implantations de dernière minute se heurter au mur des électeurs non captifs du vote socialiste.
Se faire parachuter pour récupérer un siège tout chaud, sans le moindre combat électoral ni interne ni externe et sans voir participer le moins du monde au long travail de fourmi de militants et d’élus qui ont eu la médiocrité de faire du « localisme » est autre chose. Et les militants me paraissent aujourd’hui suffisamment exigeants pour refuser des pratiques aussi singulières. Je dois dire d’ailleurs qu’au delà de la candidature de MNL, je trouve que sa désinvolture est franchement border line. Elle aurait pu au moins avoir la politesse de venir présenter les raisons de son choix à Paris lors du Conseil Fédéral. Et d’en profiter pour nous dire dans quelle section elle souhaitait désormais militer. Le mépris n’est plus de mise et à ce mépris des élus et des militants doit désormais répondre le rejet par le seul moyen possible : le vote des militants le 2 décembre.
Par ailleurs, un tel parachutage pourrait à la limite être envisagé si MNL était une élue et une militante d’une fédération non soumise à renouvellement territorial. Mais ce n’est pas le cas puisque le Nord comme le Pas de Calais sont tous les 2 soumis à renouvellement sénatorial en 2011 comme Paris. Or, ce n’est pas la première fois que la même sensibilité considère que Paris peut servir de vase de réception pour les trop pleins de candidats dans d’autres fédérations. Rappelons pour mémoire la manœuvre scandaleuse de mars 2004 quand un candidat parisien en position éligible, Daniel Assouline a été sorti de la liste entre les 2 tours pour faire élire le premier secrétaire fédéral de l’Essonne, Olivier Thomas. Ou encore l’importation de Anne Ferrara en position éligible pour les élections européennes de la même année.
Il paraît qu’il s’agit d’une personnalité « nationale » irremplaçable et indispensable au cas où le sénat passerait à gauche. J’ai une autre conception des combats politiques et je considère d’emblée que nul n’est irremplaçable. Et nos sénateurs ne sont pas des potiches qui auraient besoin d’une béquille pour faire vivre le PS parisien dans la vieille assemblée.
Je n’ai donc pas voté pour la liste au CF et ne voterai pas plus pour la liste le 2 décembre. Mais j’ai également précisé que je ne me reconnais pas dans la liste alternative présentée par Dominique Bertinotti. La candidature de Dominique Bertinotti était légitime et intéressante et tout aussi représentative de notre histoire commune à laquelle j’ai fait référence. Mais à cet égard, les candidatures de Gisèle Stievenard, d’Olga Trostiansky ou encore de Pierre Aidenbaum étaient tout aussi légitimes et se sont toutes les trois heurtées à la question des sortants, comme pour la candidature de Dominique Bertinotti.
J’ai donc précisé que pour moi, à partir du moment où le choix a été fait de respecter l’équilibre des « motions » issues du dernier congrès, il n’était pas possible d’évincer la Motion C des candidats éligibles. Je souhaite donc clairement que la liste soit rejetée par les adhérents de Paris et qu’elle le soit uniquement par refus de ce parachutage inopportun et injuste. Mais je souhaite qu’une fois rejetée, la Motion C prenne ses responsabilités pour désigner une candidate qui récolte les fruits politiques de 20 ans de graines semées par les élus et militants parisiens de toutes les motions.